Aujourd’hui, Pauline nous dévoile des secrets méconnus de notre Vallée pendant la deuxième guerre mondiale.
Ces anecdotes sont le fruit de recherches dans plusieurs ouvrages parlant de notre territoire.
Cet article est le premier d’une série de 3.
La Seconde Guerre Mondiale a marqué les mémoires alsaciennes et a laissé une empreinte douloureuse dans l’esprit de nos concitoyens les plus âgés. En hommage à toutes les personnes qui ont vécu avec courage et abnégation cette période difficile, il est important de se rappeler leur histoire. Cette liste non exhaustive d’anecdotes concernant la vallée va vous permettre de découvrir des histoires et des faits que vous ignorez sûrement.
Les témoignages présents dans cet article sont tirés du livre ’60 ans après le Val de Villé se souvient’ écrit par la Société d’Histoire du Val de Villé, financé par la Communauté des Communes de la vallée de Villé et consultable à l’Office de Tourisme de la vallée de Villé. Ce livre retrace l’histoire de la Vallée de Villé lors de la Seconde Guerre Mondiale et rapporte de nombreux témoignages d’habitants de la vallée à cette époque.
Germanisation de la Vallée
Dès juin 1940, les allemands ont rapidement imposé la culture germanique à l’Alsace. La frontière fut établie sur la crête des Vosges et le nom de tous les villages de la vallée fut germanisé. Ainsi, Fouchy devient Grube, Lalaye Lach, Charbes Mittelscheer, Neubois Gereuth, Villé Weiler, Albé Erlenbach, Maisonsgoutte Meisengott.
« Les occupants cherchent à effacer au plus vite les souvenirs de la présence française. Les panneaux indicateurs des villages, par endroit préalablement enlevés lors de la retraite des troupes françaises, étaient remplacés par des dénominations allemandes, ainsi que toutes les inscriptions sur la voie publique, qui devaient disparaitre. » -Témoignage d’Antoine Fuchs
Filières d’évasion & transmission de courrier
Lorsque les troupes allemandes arrivèrent en Alsace la frontière fut rétablie selon l’ancien tracé de 1870 à 1918 sur la crête vosgienne et l’Alsace devint ainsi annexée au Reich. La nouvelle frontière longe la vallée de Villé en passant par le Col de Steige, le Climont et le Col d’Urbeis. L’enjeu pour les habitants de la vallée était de passer cette frontière vers l’Ouest pour transmettre du courrier ou des informations et surtout pour la faire traverser à des milliers de personnes. Parmi ces fuyards on retrouvait des soldats français fait prisonniers, des soldats évadés de camps, des alsaciens désireux de quitter la province et donc le régime nazi pour rejoindre la France libre et les maquis, des résistants alsaciens traqués par la Gestapo.
La vallée de Villé regroupait deux filières principales d’évasion : la filière Sengler, du nom du transporteur de Villé et la filière Haubtmann du nom du médecin généraliste de l’époque.
Haubtmann en sa qualité de médecin avait la connaissance de presque toutes les fermes isolées et bénéficiait de la confiance de la population. Il soignait, hébergeait, nourrissait et habillait les évadés avant de les envoyer dans l’arrière vallée vers les fermes isolées où le médecin savait qu’ils seraient entre de bonnes mains. On peut affirmer que la quasi-totalité des fermes du secteur du Climont ont été impliquées dans des activités de passage.
La filière Sengler prenait naissance dans le vignoble de Barr et transitait vers le Donon ou le Val de Villé en passant par Bernardvillé, Reichsfeld ou encore Le Sauloch. Fernand Sengler connaissant très bien les fermiers et bûcherons de l’arrière vallée bénéficiait pour ses camions de sauf-conduits pour le transport des grumes de bois et des matières textiles. Les évadés étaient souvent cachés dans ses camions pour être déposés au Col de Steige ou à La Salcée dernier hameau avant la frontière.
« Puis un jour, fin mai, Fritz vient demander si nous connaissions une personne intéressée pour entretenir le cimetière allemand du Col d’Urbeis. Yvonne ma grande sœur donne son accord sur le champ pour l’entretien de ces 32 tombes. (…) Comme elle passait déjà du courrier dans les deux sens, ce petit travail vient fort à propos. Yvonne s’organise avec notre cousine Marie qui habite à quelques pas du cimetière. Les échanges de lettre se font derrière le cimetière dans une boîte cachée sous un tas d’herbe. » -Témoignage de Pierre Schramm
Corruption par la gastronomie alsacienne
Lors de l’occupation, les allemands se rendirent bien vite compte que la population alsacienne-mosellane n’adhérait pas à la nouvelle idéologie et l’arsenal répressif se mit rapidement en place. La Vallée de Villé s’est vu implanter 3 postes de gendarmerie à Maisonsgoutte, Villé et Saint Maurice.
« A Villé, le gendarme en chef s’appelait Schumacher. Au début, il était un peu dur, car à Triembach il y a eu des expulsions. Après cela, il est devenu comme des nôtres. Les petits commerçants de Villé l’ont acheté avec leurs marchandises, miel, viande et alcool. » -Témoignage de Alphonse Guntz
« Le gendarme Senftleber installé à Saint-Maurice était sévère au début, mais s’est adouci par la suite grâce au schnaps, vin et lard des paysans locaux. » -Témoignage de Marie-Rose Dollé
Voilà pour la première partie de cette série.
Nous espérons que ces anecdotes auront touché votre curiosité et que vous serez au rendez-vous pour les deux 2 volets.