Le circuit de mémoire de la Vallée de Villé
Comme toute l’Alsace, la vallée de Villé a connu une histoire mouvementée depuis la fin du XIX siècle de par son partage entre la France et l’Allemagne, conséquence des conflits de 1870, de la Première et Seconde Guerre Mondiale.
En 1870 l’Alsace est annexé pour la première fois par l’Allemagne du IIème Reich jusqu’à l’armistice de 1918. Une seconde annexion de l’Alsace se produira sous le IIIème Reich en 1940 jusqu’à la libération finale en 1944. Ces changements successifs d’appartenance ont profondément marqué les Alsaciens, par ailleurs écartelés entre un sentiment majoritaire d’identité française et une culture largement germanisante.
Le Souvenir Français a mis en place un circuit de mémoire des différentes étapes marquantes de l’histoire de la vallée de Villé afin de témoigner de son passé et de rendre hommage aux anonymes victimes de la folie meurtrière de l’homme.
Ce circuit vous permettra de parcourir la vallée à la découverte de ses différents villages tout en découvrant la richesse et la variété de ses paysages. Retour sur les différents lieux de mémoires et un bout de leur histoire :
La guerre de 1870
La guerre de 1870 ne touche guère la vallée de Villé, hormis le combat de Thanvillé le 17 août de cette année. Il s’agit d’une action de harcèlement comme les troupes allemandes en feront par la suite l’amère expérience, au grand dommage des populations.
Neuve Eglise & Thanvillé
En août 1870 donc, des Gardes Mobiles français attaquèrent les cavaliers badois stationnés près du château de Thanvillé provoquant un mort et quelques blessés. L’occupant, considérant que la population civile s’était rendue complice des Mobiles réagit en représailles sauvages sur les habitants de plusieurs localités voisines. De nombreux civils furent donc sabrés ou fusillés et le château de Thanvillé fut pillé.
Une stèle située à Neuve Eglise retraçait ce massacre, perpétré dans la nuit du 17 au 18 août 1870 et portait les noms de la plupart des victimes. Le monument fut détruit en juin 1940 lors de l’arrivée des nazis dans la vallée. Une toile illustrée par le peintre Touchemolin et conservée à la mairie de Thanvillé retrace cet épisode.
Première guerre mondiale
Au début du 20ème siècle, des investissements industriels commencent à voir le jour et l’implantation de ces industries (manufacture de cigare, atelier textile…) favorise le décollage économique de la vallée. Une certaine aisance se répand dans la population et la vie associative se développe mais l’embellie ne dure qu’un temps. La première guerre mondiale surprend tout le monde et fait voler en éclats un monde encore imprégné des coutumes et traditions du siècle dernier.
Triembach-au-Val
En août 1914 alors que la première guerre mondiale ne fait que commencer, le Val de Villé connait de violents accrochages du 16 au 19 août. Les troupes françaises prirent possession dans un premier temps de la vallée avant d’être délogées, se repliant sur les crêtes après avoir volontairement incendié Honcourt. Les combats firent de nombreuses victimes militaires, inhumées dans les cimetières militaires ou dans des fosses communes telles que celle de Triembach qui reccueillit deux soldats français, un officier et vingt soldats bavarois. Un monument situé derrière l’église de Triembach-au-Val rappelle encore leur mémoire.
Une stèle est également présente au Col de la Charbonnière rendant hommage aux soldats français du 11e bataillon de chasseurs alpins et des soldats allemands du 14e et 15e Landwehr ayant combattu pendant ces mêmes trois jours meurtriers.
Saint Maurice
La nuit du 18 au 19 août 1914, une partie du village de Saint-Maurice fut incendiée par les troupes allemandes qui y avaient essuyé quelques coups de feu. 38 maisons sur 71 furent incendiées par les bavarois qui pensaient que les villageois s’étaient ralliés aux Français. Deux soldats français, prisonniers, et quatre civils locaux périrent dans la répression sanglante. Le monument élevé en souvenir des victimes a lui aussi été détruit par les nazis en 1940. Les tombes des victimes sont visibles au cimetière communal de Saint-Maurice.
Neubois & Thanvillé
Une stèle à la mémoire des soldats morts le 18 août 1914 a été érigée à Neubois signifiant le lieu de la vallée où les combats furent les plus durs entre français et allemands au cours de cette nuit sanglante.
Le cimetière allemand de Thanvillé abrite les soldats tombés lors des combats du mois d’août 1914. [un dépliant est disponible à l’Office de Tourisme de la Vallée de Villé afin d’en savoir plus]
Une croix rendant hommage à la personne qui a négocié avec les allemands pour que Thanvillé ne subisse pas le même sort que Saint-Maurice se trouve au centre du village de Thanvillé.
Villé
On retrouve, à côté du collège de Villé, une nécropole nationale (ou cimetière militaire) où sont enterrés des soldats alsaciens enrôlés de force ainsi que des soldats russes et français tombés lors des combats dans la vallée. Lors de cette première guerre mondiale on estime à 294 le nombre de soldats de la vallée de Villé ayant péris lors des hostilités.
Seconde guerre mondiale
A la suite de la ‘drôle de guerre’, les allemands franchissent le Rhin le 14 ou 15 juin 1940, obligeant l’armée française à se replier vers les crêtes vosgiennes par les vallées. Des altercations ont lieu au Val de Villé et Triembach-au-Val est atteint par des salves d’obus. La dictature nazie s’installe progressivement. Un nombre important d’enfants tombent sous l’uniforme nazi et beaucoup termineront leur courte vie dans les camps de prisonniers russes. Beaucoup refusent cet état de fait et plongent dans la clandestinité ou la Résistance. Pendant toute la guerre, la vallée de Villé voit fonctionner plusieurs filières d’évasion qui, grâce aux habitants complices et aux passeurs, acheminent des centaines d’évadés, réfractaires ou résistants.
Chemin de la Résistance
Le Chemin de la Résistance et de la Liberté est un parcours de 10km jalonné de 12 panneaux témoignant de faits ayant eu lieu dans la région durant la Seconde Guerre Mondiale. Des bornes datant de l’annexion de l’Alsace / Lorraine au IIème Reich sont présentes le long du parcours matérialisant la frontière entre la France et l’Allemagne de 1870 reprise à l’identique lors de l’annexion de 1940. Ce chemin s’établie sur les crêtes vosgiennes et résume, par différentes pancartes, l’histoire de la résistance dans la vallée de Villé, de nos voisins de Rombach-le-Franc et des Vosges et de nos libérateurs Américains lors du second conflit mondial. Le départ du sentier se fait au col d’Urbeis ou au col de Noirceux. [Une sortie de groupe (minimum 10 personnes) est possible avec un guide sur réservation auprès de l’Office de Tourisme de la Vallée de Villé]
Sauloch
Le 18 mars 1944, l’US Air Force effectue un raid de bombardement sur différentes industries dans le Sud et l’Allemagne. Ce sont plus de 700 bombardiers lourds et un millier d’avions de chasse qui sont déployés pour cette mission. Au milieu de l’après-midi, l’armada est sur le chemin du retour quand les bombardiers sont attaqués par les chasseurs allemands. Le 55e Fighter Group américain fut engagé dans ce combat avec Bradford Wickholm en pilote d’un des engins. L’avion de Brad, qui fut touché par les tirs, alla s’écraser près de l’actuel restaurant Sauloch. Brad tenta de s’extraire en sautant à parachute mais l’engin était déjà trop bas et son corps fut retrouvé à une centaine de mètres de l’impact. Il fut enterré au cimetière local avant d’être rapatrié dans un cimetière militaire de San Franscisco.
Breitenau
Une plaque commémorative a été érigée au monument aux morts à côté de l’église rendant hommage au sergent-chef Marion Weiskopf ayant sacrifié sa vie pour sauver des membres de son unité et permettre la libération de la vallée de Villé. Arrivé par la montagne le 26 novembre 1944, un bataillon américain emmené par le sergent Weiskopf est descendu vers le village de Breitenau. Des soldats allemands leur ont tirés dessus, tuant le sergent-chef avant de finalement se rendre aux américains. Le jour même, Villé fut libéré.