Blog Tourisme Vallée de Villé

Morgane Guth – La ferme de Berlicombel

Depuis quelques années, la vallée de Villé voit son territoire transformé par l’arrivée de jeunes agriculteurs qui semblent trouver un intérêt non négligeable à l’endroit.
Les forêts remontent, les prés ouvrent à nouveau un paysage dégagé, et le décor qui se plante doucement, reprend les traits des paysages qu’ont connu nos grands-parents !

Morgane fait partie de ces agriculteurs qui tentent l’aventure de s’établir en agriculture dans la vallée de Villé.
Pour Morgane c’est la filière ovine qui a été choisie et nous avons décidé de la rencontrer pour découvrir sa passion, son métier mais également les produits qu’elle propose.

Direction Fouchy, à la rencontre de Morgane et de SA Bergerie de Berlicombel.

-Bonjour Morgane,
Est-ce que vous pouvez commencer par vous présenter à nos lecteurs.

Je m’appelle Morgane, j’ai 26 ans et suis jeune maman. J’ai toujours aimé les activités de plein-air et le lien aux autres, c’est ainsi que j’ai suivi des études d’éducatrice socio-sportive.  Mais il me manquait le lien à la nature, j’ai donc fait une reconversion pour devenir officiellement agricultrice en mai 2020. J’ai déjà parcouru une belle partie du chemin avec la reprise de la ferme et l’aménagement de la fromagerie, mais il reste encore la bergerie à monter et la troupe de brebis à agrandir. Finalement il se révèle que ce métier est beaucoup plus sportif que le précédent !

-La voilà ! certains l’attendent … d’autres n’en peuvent plus… la traditionnelle question !
Morgane, êtes-vous originaire de la Vallée de Villé et si non, d’où venez-vous ?

Je suis originaire de Fouchy. Enfant, j’ai passé beaucoup de temps avec mes grands-parents, mon grand-père avait un petit élevage hétéroclite dont on s’occupait ensemble. Je trouvais ça passionnant, mais ne pensais pas qu’on pouvait en vivre. Aujourd’hui j’ai repris la dernière ferme du village, qui était encore très proche du modèle vivrier. J’ai eu besoin de temps pour imaginer un modèle viable qui me corresponde et peu à peu les choses se concrétisent.

-Pourquoi avoir choisi d’élever des moutons ?
La ferme comptait déjà quelques vaches allaitantes et environ 25 ha de terres, je voulais la diversifier avec un autre atelier. Il y a déjà de nombreux agriculteurs dans la Vallée, qui font des produits de qualité. L’élevage de brebis laitières me permet de proposer quelque chose de différent. Les brebis sont faciles à manipuler et sont bien adaptées à mes prairies de montagne. Je prends beaucoup de plaisir en fromagerie, la transformation du lait offre beaucoup de possibilités.

-Vous développez depuis mai 2020 votre exploitation et avez je crois, commencé à produire vos fromages de brebis.
J’ai d’abord fait un Brevet Professionnel de Responsable d’Entreprise Agricole de septembre 2018 à juin 2019. Puis quelques stages en Moselle et dans les Hautes Alpes. Je me suis installée officiellement en mai 2020, à la fin de mon congé maternité. Cette première année je n’ai commercialisé que de la viande d’agneau et de veau.
Depuis le mois de décembre nous avons, avec l’aide de ma famille et d’amis, transformé l’ancienne grange de mes grands parents en fromagerie. J’y ai fabriqué et commercialisé des fromages et yaourts tout l’été. Les brebis se tarissent à présent et c’est la saison des colis de viande qui reprend. La fromagerie rouvrira au printemps après la naissance des prochains agneaux. 

Est-ce que la filière ovine est présente en Alsace et sur le massif des Vosges depuis toujours ou est-ce qu’elle réapparait grâce à votre génération d’agriculteurs ?
Je ne sais pas vraiment répondre à cette question, la filière existante concerne les brebis allaitantes et très peu les laitières. Du coup je n’y suis pas impliquée.

-Vous élevez une seule et même race ?
Laquelle (lesquelles ?) et pourquoi ?

J’ai principalement des brebis de race Lacaune, c’est la race traditionnelle du Massif Central, ce sont de bonnes laitières. Je les ai vus naitre pour la plupart, elles sont vraiment sympas. J’ai essayé d’en racheter ailleurs pour agrandir ma troupe mais j’ai eu de mauvaises surprises, alors je vais faire preuve de patience et garder les filles des miennes pour agrandir mon troupeau. Je peux aussi choisir des béliers de races laitières différentes pour apporter de la rusticité ou d’autres qualités.

-Est-ce que vous avez travaillé sur d’autres exploitations avant de vous lancer seule ?
Avant ma formation j’avais travaillé quelques semaines à la Ferme Lindgrube j’y ai découvert la transformation du lait et l’organisation des circuits de vente. Pendant ma formation j’ai fait 10 semaines de stage à la ferme de la Forêt en Moselle puis j’y ai travaillé un peu, ils m’ont vraiment donné les bases en élevage de brebis laitières et m’ont donné la confiance dont j’avais besoin pour me lancer. J’ai aussi fait 6 semaines de stage à la Bergerie des Roches dans les Hautes-Alpes, pour approfondir mes notions de conduite du troupeau en bio.

-L’image du berger et de la bergère est souvent celle de la personne qui garde le troupeau en estives ! Aujourd’hui vous êtes éleveuse et productrice de fromages mais est-ce que vous vous définissez aussi comme « bergère » ?
Le lien aux animaux est la base de mon travail chaque vache, chaque brebis est singulière alors je suis peut-être un peu bergère et vachère, mais aussi fromagère, vendeuse, comptable, un peu vétérinaire, … J’aime beaucoup cette diversité mais parfois je m’y perds un peu, c’est un véritable apprentissage de tous les jours.

-Avez-vous déjà vécu une saison d’estive ? C’est comment ?
Ça m’aurait plu, mais non, je n’en ai jamais vécu.

-Morgane, aujourd’hui combien de bêtes avez-vous à la bergerie ?
J’ai une quinzaine brebis en lactation, et quelques autres ainsi que 2 béliers. Au printemps elles ont donné naissance à une vingtaine d’agneaux dont les femelles viendront agrandir mon troupeau l’année prochaine et les mâles partiront en colis cet automne.
-J’ai croisé quelques photos sur internet et il me semble avoir vu d’autres animaux qui ne ressemblaient pas du tout à des moutons !
Est-ce que vous élevez d’autres bêtes pour la production ?

Effectivement j’ai gardé les vaches présentes sur l’exploitation. Elles seront bientôt 8, plus un jeune taureau, c’est un petit troupeau et je veux qu’il reste de cette taille. Elles sont au pré l’été et passent l’hiver dans une ancienne étable pour le moment. Ça me permet aussi de vendre des colis de veau qui sont complémentaires avec mon activité de fromagerie.

-On entend, médiatiquement, que l’agriculture française est en difficulté, que les agriculteurs sont en souffrance et délaissés par notre gouvernement.
Pourtant, vous êtes de plus en plus nombreux à vous installer ou vous réinstaller dans la Vallée.
Comment voyez-vous la chose de votre côté ?

Personnellement, j’ai eu la chance de pouvoir reprendre une exploitation existante, ce qui a permis d’accéder à du foncier. Pour mon installation, j’ai eu plusieurs soutiens financiers, le plus important est la Dotation Jeune Agriculteur versée par la Région, l’Etat et l’Europe. Il y a aussi des aides spécifiques pour les différents équipements, comme par exemple l’aide à l’achat d’un tracteur spécifique à la montagne versée par la région Grand Est. Et surtout j’ai eu beaucoup de soutien de la part de ma famille pour réaliser les différents travaux.
Mais comme les autres je ne suis épargnée par les nombreuses nouvelles problématiques auxquelles nous devons faire face comme les sécheresses, les dégâts de sangliers dans les prés… Heureusement il existe des associations de producteurs pour mener des réflexions sur ces sujets et se soutenir.

-Touristiquement, les élevages et producteurs comme vous ont le vent en poupe.
Il y a une vraie demande pour les produits des producteurs locaux et les visites de fermes. Est-ce que vous ressentez cet engouement ce la part de vos clients et surtout de la part des touristes ?

Mes premiers clients sont dans mon entourage proche, des habitants de Fouchy et des villages voisins qui savent comment j’élève mes animaux. Je m’efforce de proposer des produits de qualité, et beaucoup (viennent et) reviennent pour cela. J’ai aussi reçu des touristes cet été, quelques-uns déçus de ne pas trouver de munster mais toujours partant pour goûter un fromage de brebis puis qui repassent par la fromagerie avant de rentrer pour ramener un peu de fromage en guise de souvenir de vacances.
Je suis toujours surprise de rencontrer parfois des personnes qui ont perdu ce lien avec le vivant. Je crois que c’est pour cela que les petits producteurs ont tant d’importance aujourd’hui. Rencontrer les clients me permets d’expliquer à ceux qui le demandent pourquoi les brebis arrêtent de faire du lait pendant l’hiver, comment on fait du fromage, ce que mange un mouton …  

-Morgane, quelle est à ce jour votre plus grande fierté en tant qu’agricultrice fraichement installée ?
Ma fromagerie, nous y avons passé tout notre temps depuis cet hiver, toute ma famille et beaucoup de nos proches s’y sont investi et, même s’il reste quelques finitions, je suis vraiment fière du résultat. Cette première saison a été courte, mais j’ai rencontré une clientèle fidèle et toujours encourageante. 

-Et l’avenir ? Comment voyez-vous votre développement et l’évolution de la bergerie dans les années à venir ?

La prochaine grande étape est la construction de la bergerie qui devrait se finir au printemps. Elle me permettra de faire dormir mes brebis au chaud l’hiver et d’agrandir le troupeau. Je pourrai aussi y regrouper mes vaches qui auront une plus grande liberté de mouvements que dans l’ancienne étable. Enfin, ça améliorera considérablement mes conditions de travail puisque tous les animaux seront au même endroit une partie de l’année.
Je vous pose une série de question vous répondez sans réfléchir ^^
-Votre animal préféré ?  Brebis
-Votre couleur préférée ? Jaune
-Bière ou picon ? Plutôt jus de fruit
-Chien ou chat ? Chien
-Les Vosges ou les Alpes ? Les Vosges
-Sport ou pas sport ? Sport
-Fromage frais de brebis ou munster ? Frais de brebis


-Et vos fromages alors ? Que proposez-vous à la vente ?
Des yaourts natures ou sur lit de fraise, abricot ou châtaigne.
Des fromages frais nature ou enrobés de poivre ou d’ail des ours.
J’ai aussi quelques idées de nouveautés pour la saison prochaine.

-Est-ce que vous transformez tout toute seule ou vous êtes aidée sur l’exploitation ?
Je suis officiellement seule sur la ferme mais sans le soutien de ma famille ce ne serait pas possible. Mon mari et mon beau-père font la fenaison, c’est-à-dire la récolte du foin qui servira à nourrir les animaux l’hiver, car je ne suis vraiment pas à l’aise avec un tracteur. Mon père s’occupe de la maintenance des appareils et il fabrique des objets pour améliorer l’ergonomie de mon travail. Mes parents proposent aussi mes produits à leurs collègues. En somme, c’est une aventure familiale qui laisse une place à chacun de s’investir.


-Pour un troupeau comme le vôtre, combien de litres de lait et de fromage sont produits par jour ?
En moyenne 15 litres de lait par jour, qui font une trentaine de fromages par jour ou une centaine de yaourts. Mais la lactation d’une brebis est courte, elle allaite son agneau 1 à 2 mois puis sa production baisse peu à peu, jusqu’au tarissement en octobre.


Votre fromage préféré Morgane, ce lequel ?
Au poivre, découpé en petit dés dans une salade.

-Le retour du loup dans les Vosges, tout proche de chez nous et la présence du lynx posent elles des problèmes à votre élevage ?
Actuellement, j’ai déjà beaucoup de choses à gérer, je n’ai pas le temps ni l’énergie de me poser la question, mais dans un coin de ma tête, oui ça me fait peur. Je n’y ai pas été confrontée, mais j’ai une toute petite troupe alors une attaque aurait vraiment des conséquences désastreuses. D’ailleurs il ne faut pas seulement voir les animaux tués, il y a ceux qui sont blessés, choqués, et les conséquences sur l’éleveur…

-Est-ce que vous travaillez avec des chiens de protection et des chiens de troupeaux ?
Non je n’en ai pas encore, pour le moment le quotidien est déjà bien chargé. Lorsque j’aurai un quotidien plus serein, je prendrai te temps de dresser un chien de berger. Si la pression du loup se fait trop forte alors je travaillerai aussi avec un chien de protection mais je préférerai m’en passer.

-Est-ce que l’on peut visiter votre exploitation et venir vous rencontrer ?
Avec plaisir, les animaux sont éparpillés un peu partout à Fouchy et dans les villages voisins, mais ma fromagerie se situe au 14 rue Principale à Fouchy. Elle est ouverte de mars à septembre, la mardi de 16 à 18h et le samedi de 14 à 16h. 

Quelle est l’origine du nom de la Bergerie et que veut-il dire ?
Berlicombel est un-lieu dit en contre haut de là où sera implantée ma bergerie. J’aime bien les sonorités de ce mot. Dernièrement j’ai trouvé une très vieille carte retrouvée dans des archives, l’orthographe est Berlicombelle, alors un jour je rebaptiserai peut être la ferme.

Morgane, avant de vous laisser le mot de la fin, je vous remercie énormément pour votre temps et espère venir vous rencontrer pour découvrir votre troupeau, votre bergerie et faire une petite dégustation.
Merci beaucoup et à très bientôt.

TOP

Les magazines de l’Office de Tourisme de la Vallée de Villé

Inscrivez vous à notre Newsletter

pour recevoir nos derniers bon plans dans la Vallée de Villé